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Session 2: Les espaces de l'expérience urbaine

 Jeudi 22 juin, 11h00-12h00

Animé par Srilata Ravi

Nicolas Treiber: Le parcours de la non-reconnaissance. Topographie littéraire d’un écotone postcolonial

Nous proposons d’étudier le traitement littéraire d’un écotone postcolonial dans la littérature africaine d’expression française entre 1960 et 1974, à travers la mise en scène de l’expérience parisienne de quatre étudiants africains : Kocoumbo dans Kocoumbo l’étudiant noir d’Aké Loba (1960), Samba Diallo dans L’Aventure ambiguë de Cheikh Hamidou Kane (1961), Fatoman dans Dramouss de Camara Laye (1966) et Kanaan dans Chaîne de Saïdou Bokoum (1974). En définissant la zone de transition entre deux espaces, l’écotone peut faire apparaître la zone de transaction entre deux univers culturels dans laquelle évolue le migrant. Nous allons tenter de l’arpenter en suivant la structuration idéologique des frontières sociales et raciales mouvantes qui s’érigent sous les pas des personnages et la façon dont ceux-ci les contournent où s’y cognent. En enjambant la période coloniale, cette série de quatre textes permet de mettre au jour une scène littéraire postcoloniale où questionner à la fois la place de l'hospitalité dans une société qui institue sa domination sur l'autre et celle de l’étranger de se tracer un chemin à la lisière d’un monde qui déçoit ses attentes et pour lequel il demeure un inconnu. L’étude des réactions des personnages face à la non-reconnaissance, au racisme et à la déréliction dévoile une scène existentielle et éthique sur laquelle l’écriture de soi en migration rejoue à franchir les limites qu’elle a dû dépasser pour être. Nous allons voir en quoi la fiction de l’écotone postcolonial puise dans le laboratoire de ses propres apories les ingrédients permettant de passer du cauchemar au réveil.

 

Margot Delon: Socialisations en attente ou socialisations de l’attente ? Familles migrantes dans les bidonvilles de l’après-guerre en France

En tant qu’espaces de transition entre différents environnements sociaux, les bidonvilles et cités de transit de l’après-guerre en France représentent des écotones pour les habitant.e.s d’origine immigrée qui y ont habité pendant de longues années. Dans cette communication, j’analyse les effets socialisateurs de long-terme de ces expériences résidentielles de l’attente en tenant compte de leur diversité. En fonction de leurs dispositions antérieures au départ en France et de leurs projets migratoires, les familles d’origines algérienne, marocaine et portugaise n’ont pas donné le même sens aux bidonvilles. En fonction des configurations locales, matérielles, politiques et sociales, les enfants de ces familles n’ont pas non plus, à profil migratoire équivalent, connu des socialisations par l’espace similaires.

À partir d’une enquête auprès des personnes ayant grandi dans les bidonvilles de Nanterre et Champigny-sur-Marne, je distingue trois profils migratoires qui correspondent à trois formes d’investissement de ce temps de l’attente résidentielle : des familles de micro-propriétaires paysans, qui vivent collectivement l’épreuve du bidonville en développant des solidarités résidentielles et professionnelles afin de revenir dans le pays d’origine ; des familles urbaines, pour qui le bidonville représente une épreuve solitaire, qu’il faut surmonter pour permettre l’ascension des enfants ; des familles très précarisées, dont la trajectoire est faite de ruptures et qui tentent coûte que coûte de préserver une forme d’unité. Ces aspirations parentales n’ont cependant pas connu les mêmes conditions de réalisation, ces dernières dépendant des politiques menées, des acteurs socialisateurs locaux et d’autres critères d’exposition à l’expérience (âge, genre, rang dans la fratrie…).

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